Stadt: Paris, Frankreich

Frist: 2015-09-15

Beginn: 2016-04-14

Ende: 2016-04-15

Université Paris 13, les 14-15 avril 2016
Organisatrices : Émilie Pezard (ENS Lyon) et Valérie Stiénon (Université Paris 13-Pléiade)

Comité scientifique : Elina Absalyamova (Paris 13), Claire Barel-Moisan (CNRS-ENS Lyon), Christèle Couleau (Paris 13), Quentin Deluermoz (Paris 13), José-Luis Diaz (Paris 7), Jacques-David Ebguy (Paris 7), Philippe Hamon (Paris 3), Matthieu Letourneux (Paris 10), Denis Pernot (Paris 13), Émilie Pezard (ENS-Lyon/ANR Anticipation), Jean-Marie Seillan (Nice), Valérie Stiénon (Paris 13), Jean-Didier Wagneur (BnF)

Appel à contributions

Le XIXe siècle a vu s’opérer le « sacre du roman1 » (Mona Ozouf). La promotion de ce genre anciennement déprécié est liée à l’entreprise de légitimation qu’ont menée, dans leurs œuvres, quelques grands romanciers du siècle, comme Balzac et Zola. Elle se manifeste aussi par l’augmentation quantitative des romans publiés, la diversification des supports éditoriaux (volumes, feuilletons, recueils) ainsi que celle des modes de diffusion (cabinets de lecture, collections, compilations). Ces différents facteurs induisent une « spécialisation du roman2 », c’est-à-dire une division du genre romanesque en de multiples sous-genres. Roman noir, personnel, sentimental, historique, d’aventures, de mœurs, de cape et d’épée, mondain, psychologique, scientifique ne sont que quelques-unes des catégories permettant aux contemporains de partitionner un domaine romanesque devenu immense. Cette multiplication est facilitée par la possibilité de définir un genre à partir de nombreux critères, plus ou moins pertinents. Théophile Gautier juge ainsi que le roman maritime est « une spécialité beaucoup trop étroite »: « Demain, un autre s’arrogera le monopole des romans en diligence […]. Les ports seront des auberges, et au lieu de sombrer on versera3. » D’autres genres ont été oubliés : qui se souvient du roman ecclésiastique ou du roman militaire ?

Alors que de nombreux travaux ont déjà permis de préciser les connaissances sur un genre particulier, nous souhaiterions porter un regard englobant et transversal sur cette division du roman en de multiples genres, qui nous semble constituer un enjeu majeur pour l’étude de la production littéraire au xixe siècle. Les genres sont en effet des catégories permettant de lire, de penser et d’écrire le roman. Ce sont des constructions historiques, qui relèvent autant de la littérature que de son commentaire : omniprésents dans les discours critiques et paratextuels, les genres structurent la perception de la production romanesque.

Du côté des lecteurs, ils contribuent à classer, hiérarchiser et interpréter les œuvres. Ils tracent la frontière entre littérature légitime et littérature populaire. Les limites entre les genres sont cependant labiles et bien des œuvres résistent à une classification univoque. Ainsi, en 1896, Le Roman en France pendant le xixe siècle place Rosny aîné dans le chapitre sur le « roman scientifique », aux côtés de Verne, alors que la réédition de 1909 préfère le classer dans le « roman psychologique ». L’attribution d’une étiquette générique à une œuvre témoigne d’une lecture particulière, susceptible d’évoluer au fil de l’histoire : lu comme un « roman frénétique » à sa parution en 1823, Han d’Islande est relu quelques décennies plus tard comme un « roman de chevalerie ». D’une lecture à l’autre, la figure de l’ogre sanguinaire s’est effacée devant le couple d’Ordener et Ethel.

Du côté des écrivains, les genres peuvent être des bannières à revendiquer ou, au contraire, des héritages à dissimuler. Eugène Sue se pose en créateur du roman maritime dans les années 1830, Paul Bourget en maître du roman psychologique dans les années 1880. Les écrivains sont ainsi amenés à définir leur position dans un jeu dialectique entre imitation et innovation, entre recherche du succès public et quête de l’approbation des critiques.

De nombreuses pistes d’études sont envisageables. La réflexion pourra s’appuyer notamment sur les suggestions suivantes :

  • l’évolution du système des genres : un genre peut-il traverser le siècle sans subir de transformations majeures ? Quelles hybridations peut-on observer entre les genres ?
  • les appellations génériques : dans quelle mesure l’histoire du genre peut-elle être distinguée de celle de son nom ? Les appellations peuvent-elles se succéder ou se concurrencer pour un même genre ?
  • la théorie des genres du roman : quels sont les critères de définition des genres romanesques (thématiques, formels, stylistiques…) ?
  • les genres comme outils herméneutiques : quels liens observe-t-on entre l’interprétation d’une œuvre et sa catégorisation générique ? Selon quels facteurs les classements génériques peuvent-ils évoluer ? Y a-t-il des auteurs dont les œuvres ont particulièrement suscité des difficultés de classement ?
  • la hiérarchie établie entre les genres : la « littérature de genre » est-elle nécessairement, au xixe siècle, une littérature populaire ? Quels sont les genres que la critique reconnaît comme légitimes ?
  • le positionnement auctorial dans le système des genres : quels sont les genres que l’on revendique ? Comment un auteur justifie-t-il sa spécialisation dans un genre ? Se donne-t-il le titre d’inventeur ou s’inscrit-il dans une tradition ?
  • l’épistémologie des genres : comment étudier aujourd’hui les genres du passé ? Comment traiter les genres oubliés ? Comment éviter les écueils souvent reprochés : essentialisme, anachronisme, lecture téléologique, nominalisme ?

Les propositions de communication d’environ 250 mots, accompagnées d’une brève bio-bibliographie, sont à envoyer, au format .doc ou .docx, avant le 15 septembre 2015 conjointement à Émilie Pezard (emilie.pezard@ens-lyon.fr) et Valérie Stiénon (valerie.stienon@univ-paris13.fr). Après examen des propositions par le comité scientifique, les réponses seront données dans le courant de l’automne 2015.

Bibliographie sélective

Études générales
Combe Dominique, Les Genres littéraires, Paris, Hachette, coll. Contours littéraires, 1992.
Diaz José-Luis (dir.), Romantisme n° 160 : Conquêtes du roman, 2013.
Fish Stanley, Quand lire, c’est faire. L’autorité des communautés interprétatives, Paris, Les Prairies Ordinaires, coll. Penser/Croiser, 2007.
Gilbert Eugène, Le Roman en France pendant le XIXe siècle, Paris, E. Plon, Nourrit et Cie, 1896.
Glinoer Anthony, « Classes de textes et littérature industrielle dans la première moitié du xixe siècle », COnTEXTES, mis en ligne le 26 mai 2009.
Hamburger Kate, Logique des genres littéraires, Paris, Seuil, coll. Poétique, 1986.
Huret Jules Enquête sur l’évolution littéraire 1891, Paris, José Corti, 1999.
Iknayan, Marguerite, The Idea of the Novel in France : the critical reaction, 1815-1848, Genève/Paris, Droz/Minard, 1961.
Lyon-Caen Judith, La Lecture et la vie. Les usages du roman au temps de Balzac, Paris, Tallandier, 2006.
Moncond’huy Dominique et Scepi Henri (dir.), Les Genres de travers. Littérature et transgénéricité, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, coll. La Licorne, 2008.
Moretti Franco, Graphes, cartes et arbres. Modèles abstraits pour une autre histoire de la littérature, Paris, Les Prairies Ordinaires, 2008.
Pellissier Georges, « Le roman », Histoire de la langue et de la littérature française, des origines à 1900, dir. Louis Petit de Julleville, Paris, A. Colin, 1896-1899, t. VII, p. 413-477.
Pergameni Hermann, « L’évolution du roman français au xixe siècle », Revue hebdomadaire des cours et conférences, 5e année, n° 19, 18 mars 1897, p. 64-87.
Reverzy Éléonore, Le roman au XIXe siècle, Paris, SEDES, coll. Campus lettres, 1998.
Schaeffer Jean-Marie, Qu’est-ce qu’un genre littéraire ?, Paris, Seuil, coll. Poétique, 1989.
Thérenty Marie-Ève, « Poétique historique du support et énonciation éditoriale : la case feuilleton au xixe siècle », Communication & langages, vol. 166, décembre 2010, p. 3-19.

Études sur un genre spécifique
Artiaga Loïc, Le Roman populaire, 1836-1960. Des premiers feuilletons aux adaptations télévisuelles, Paris, Autrement, Mémoire/Culture, 2008.
Boyer Alain-Michel et Couégnas Daniel (dir.), Poétiques du roman d’aventures, Paris, Editions Cécile Defaut, Horizons comparatistes, 2004.
Boyer Alain-Michel, « Pour une typologie du roman d’aventures maritimes », Rêveries marines et formes littéraires, dir. Marie Blain et Pierre Masson, Nantes, Université de Nantes, Pleins Feux, coll. Horizons comparatistes, 2001, p. 60-75.
Bridenne Jean-Jacques, La littérature française d’imagination scientifique, Paris, G. A. Dassonville, 1950.
Constans Ellen, Parlez-moi d’amour : le roman sentimental, des romans grecs aux collections de l’an 2000, Limoges, PULIM, 1999.
Déruelle Aude et Tassel Alain (dir.), Problèmes du roman historique, Paris, L’Harmattan, 2008.
Dufief-Sanchez Véronique, Philosophie du roman personnel de Chateaubriand à Fromentin : 1802-1863, Genève, Droz, 2010.
Gendrel Bernard, Le Roman de mœurs : aux origines du roman réaliste, Paris, Hermann, 2012.
Glinoer Anthony, La Littérature frénétique, Paris, PUF, coll. Les littéraires, 2009.
Hamon Philippe et Viboud Alexandrine (dir.), Dictionnaire thématique du roman de mœurs (1850-1914), Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, 2003.
Le Roman sentimental : actes du colloque des 14-15-16 mars 1989, Limoges, Faculté des lettres et sciences humaines, 1990.
Letourneux Matthieu, Le Roman d’aventures, 1870-1930, Limoges, PULIM, coll. Médiatextes, 2010.
Mellier Denis et Ruiz Luc (dir.), Dramaxes : de la fiction policière, fantastique et d’aventures, Fontenay-aux-Roses, ENS Éditions, coll. Signes, 1995.
Melmoux-Montaubin Marie-Françoise, Le Roman d’art dans la seconde moitié du xixe siècle, Paris, Klincksieck, coll. Bibliothèque du xixe siècle, 1999.
Mombert Sarah, « Esquisse d’une histoire du terme “roman de cape et d’épée” », dans Duels en scène, Avignon, CERIEAS, 2005, p. 181-186.
Neiva Saulo et Alain Montandon, Dictionnaire raisonné de la caducité des genres littéraires, Genève, Droz, 2014.
Pernot Denis, Le Roman de socialisation (1889-1914), Paris, PUF, 1998.
Peyrache-Leborgne Dominique et Couégnas Daniel (dir.), Le Roman historique : récit et histoire, Nantes, Pleins feux, 2000.
Quéffelec, Lise, Le Roman-feuilleton, Paris, PUF, coll. Que sais-je ?, 1986.
Sangsue Daniel, Le Récit excentrique : Gautier, de Maistre, Nerval, Nodier, Paris, José Corti, 1987.
Seillan Jean-Marie, Aux sources du roman colonial (1863-1914). L’Afrique à la fin du XIXe siècle, Paris, Kharthala, coll. Lettres du sud, 2006.
Seillan Jean-Marie, Le roman idéaliste dans le second xixe siècle : littérature ou bouillon de veau ?, Paris, Classiques Garnier, 2011.
Seth Catriona (dir.), Imaginaires gothiques. Aux sources du roman noir, Paris, Desjonquères, coll. L’esprit des lettres, 2010.
Suleiman Susan, Le Roman à thèse ou l’autorité fictive, Paris, PUF, coll. Écriture, 1983.
Tadié Jean-Yves, Le Roman d’aventures (1982), Paris, Gallimard, coll. Tel, 2013.
Todorov Tzvetan, « Typologie du roman policier », Poétique de la prose, Paris, Seuil, 1971.

1 C’est le titre de l’article de Mona Ozouf dans le numéro de Romantisme consacré aux « Conquêtes du roman » (dir. José-Luis Diaz, n° 160, 2013).
2 Eugène Gilbert, Le Roman en France pendant le XIXe siècle, E. Plon, Nourrit et Cie, 1896, p. 403.
3 Théophile Gautier, compte rendu d’Histoire de la marine, La Chronique de Paris, février-mars 1836, reproduit dans Eugène Sue, Romans de mort et d’aventure, éd. F. Lacassin, Laffont, coll. Bouquins, 1993, p. 1338-1339.

Beitrag von: Elina Absalyamova

Redaktion: Christof Schöch